Crédit social chinois : Adieu la vie privée !
Black Mirror is real
Vous connaissez la série Black Mirror ? En Chine, être surveillé et noté en temps réel est déjà une réalité. Ce score est pour l’instant attribué par les banques en fonction de la bonne gestion de ses comptes. D’ici 2020, Pékin souhaite rassembler des centaines de données issues d’entreprises et des autorités comme la police ou les tribunaux. Tout comptera : la situation financière, le métier, les achats, jusqu’aux commentaires postés sur les réseaux sociaux. Une trentaine de villes testent déjà ce système de crédit social.
Une citoyenne modèle est mariée, mère, s’occupe de ses parents, donne son sang, rembourse ses crédits et respecte le code de la route. Grâce à sa bonne note, elle bénéficie d’avantages : Réduction du prix des transports en commun, des musées, des bibliothèques, des factures d’eau ... Des portraits des meilleurs citoyens s’affichent sur des posters dans les rues.
Un mauvais score est sanctionné publiquement, les mauvais payeurs voient leurs noms, photos et adresses affichées. Plus de 23 millions de Chinois sont déjà recensés sur une liste noire officielle comprenant les individus dont la note sociale est tombée à zéro. Impossible pour ces personnes de désormais acheter un ticket de train ou d’avion, d’obtenir un crédit bancaire, d’avoir un passeport, de créer une entreprise, d’acheter un appartement, d’envoyer leurs enfants dans une école privée. Rare sont ceux qui osent critiquer ce qu’on pourrait appeler une « dictature numérique ».
Pour le parti communiste, ce système est surtout un moyen d’exclure ce qui contrarie l’harmonie de la société chinoise. En utilisant les moyens utilisés par le crédit social, le gouvernement va pouvoir créer une liste noire, déjà bien fournie et établir un système de punitions. Ces dernières vont permettre de rétablir les valeurs morales chinoises, selon les autorités, en punissant encore plus ceux qui ne prêtent pas allégeance au parti. Cette liste noire comprend bien entendu des criminels ou individus dangereux mais également de citoyens lambda, qui ne sont pas d’accord avec les idéologies communistes, défendent un peu trop les libertés individuelles ou la vie privée.
Les individus ne sont pas les seuls à être soumis à ce système de cotation, les entreprises le seront également. Ne rien faire d’illégal, payer ses factures et impôts permettent d’obtenir des bonnes notes et de continuer à prospérer.
Pour la population chinoise, déjà scrutée par 170 millions de caméras de surveillance à travers le pays, le crédit social laisse planer le spectre d’un nouveau recul des libertés.
Possible en Europe ?
Malgré l’avancée des nouvelles technologies et la progression du nombre de caméras qui scrutent notre quotidien, la législation européenne et en particulier, le Règlement général sur la protection des données personnelles (RGPD) ne permettrait pas un tel système de cotation pour les citoyens.
D’un côté, notre vie privée et nos libertés individuelles tendent à diminuer avec les nombreux outils d’intelligence artificielle, de caméras et de reconnaissance faciale, du big data ; et de l’autre, un cadre législatif européen et une jurisprudence qui prône le respect de la vie privée du citoyen européen. Heureusement pour nous, Black Mirror n’est encore qu’une fiction.