Une protection virtuelle: Les marques déposées dans le Metaverse
Le Metaverse, c’est quoi?
Lorsqu’on vous parle de Metaverse, à quoi pensez- vous? À un monde virtuel de tous les possibles ou plutôt un monde voué à l’échec? Nous entrons dans un nouveau paradigme informatique. Après le Web 3.0 qui fait référence à l’internet des objets, on s’apprête à entrer dans une nouvelle (univ)ère. Le Metaverse est apparu il y a quelques années et semble déjà s’imposer comme le futur du numérique. Parmi toutes les questions légales qu’apportent cette nouvelle technologie, on peut se demander si les marques déposées dans le monde réel, sont aussi valables dans le MetaVerse? Et comment protéger sa marque dans le Meta?
Entrons-nous dans univers post-réel?
Le Metaverse semble un peu difficile à définir. C’est tout son intérêt, il ne doit pas limiter l’imagination des utilisateurs. Sinon partons des bases, le mot ‘Meta-verse’ est issu de Meta qui signifie ‘Après, Post’ et Verse qui est un diminutif pour l’Univers. En somme, il s’agit d’un monde digital immersif, un monde parallèle.
Le terme a été utilisé pour la première fois dans le roman Snow Crash de Nei Stephenson en 1992. Mais le concept a passé un cap avec le changement de nom de Facebook Inc. à Meta Inc., qui compte se placer comme un leader dans ce nouvel écosystème.
On retrouve deux éléments principaux qui interagissent: (1) la réalité augmentée et (2) la réalité virtuelle.
(1) La réalité augmentée
- La réalité augmentée est un dispositif qui permet d’intégrer des éléments virtuels 3D dans le monde réel. Par exemple le jeu Pokémon Go qui a fait fureur il y a quelques années, utilise cette technologie.
(2) La réalité virtuelle
- La réalité virtuelle c’est une technologie qui permet de simuler un environnement virtuel via un ordinateur. L’utilisateur va être immergé dans un autre univers, typiquement avec un casque spécial.
Le Metaverse repose sur une nouvelle technologie, la blockchain. On vous en parlé dans cet article sur les NFTs et les droits d’auteur. Petit rappel, la blockchain c’est une technologie décentralisée qui s’opère de façon automatique grâce à l’intelligence artificielle. Outre son caractère autonome, cette technologie offre une multitude de possibilités.
En effet, c’est un élément clé du metaverse puisqu’elle permet à tout l’écosystème (NFTs, Cryptomonnaies…etc) de fonctionner.
En bref, le Metaverse est un monde parallèle digital, qui ouvre tous les champs possibles.
Tuto: Une marque déposée, c’est quoi?
Hermès, Coca-Cola, McDonald, Apple, Meta… Vous connaissez sûrement d'innombrables marques déposées. Mais que pouvons-nous déposer et sous quelles conditions dans le monde réel?
Le principe d’une marque déposée c’est de permettre aux consommateurs de faire la différence entre le produit d’une marque et celui d’un autre. C’est un indicateur d’origine.
Lorsqu’on dépose une marque, on doit l’associer à un service ou un produit. Ce dernier se classifie grâce à la ‘Classification de Nice’ qui comporte 45 classes différentes.
Par exemple, si la marque Gucci souhaite protéger son logo apposé sur un T-shirt, elle devra déposer son logo pour un produit de classe 25 (qui correspond aux T-shirt et textiles en général). En revanche, dans le cas de Google qui fournit un service de Cloud, une des classes pertinentes serait la 42 (service de cloud en ligne). Plusieurs classes pour une même marque peuvent être déposées.
On peut soit protéger une marque, soit un logo (dites marque figurative). Et qui réponds aux critères suivants:
Possède un caractère distinctif
Est utilisée: on ne peut pas protéger une marque et ensuite ne pas l’utiliser.
Le dépôt doit se faire dans un territoire spécifique, soit dans le monde entier, soit en Europe, au Benelux, ou dans un pays en particulier… Un dépôt à moins d’être fait au WIPO (CAD déposé dans ses 193 états-membres) n’est pas universel.
Alors, peut-on protéger sa marque dans le metaverse?
Déposer sa marque dans le Metaverse semble judicieux, en effet d’après une étude le secteur aura un impact sur le marché de l’e-commerce de 2 à 2,6 trillions de dollars d’ici 2030[1]. En effet, 64% des consommateurs sondés ont l’intention de faire du shopping dans le Metaverse[2]. Il y a donc un intérêt réel à s’embarquer dans ce monde digital. Mais, il existe plusieurs problèmes pour les marques déposées. Dans quelles classes doivent-elles être enregistrées? Est-ce que le principe de territorialité s’applique? Est-ce que les dépôts dans le monde réel sont aussi valables?
Premièrement, comme nous l’avons vu au-dessus, lorsqu’on dépose une marque il faut y associer un produit ou un service. Mais dans le cas du Metaverse pour quelles classes faut-il enregistrer sa marque?
Les classes 9, 35, 36, 41, 42 semblent être les plus pertinentes. En effet, elle couvre les programmes informatiques (classe 9), services de magasins de vente au détail concernant des produits virtuels (classe 35), services de divertissement (classe 35), produits virtuels non téléchargeables en ligne et NFT (classe 42) et les services financiers y compris les jetons numériques (classe 36).
Deuxièmement, qu’en est-il des territoires? A priori chaque pays ayant son propre Metaverse[3], le principe de territorialité serait toujours d’application. Il y a de multiples prédictions quant aux formes que prendra le Metaverse. Par conséquent, pour ce secteur en évolution constante, ce qui est valable aujourd’hui, ne le sera pas forcément demain.
Lorsqu’il y a des contrefaçons ou une utilisation du marque déposée, il incombe aux propriétaires de faire valoir leurs droits. C’est également vrai dans le Metaverse. En plus de surveiller les canaux traditionnels, les marques (surtout les plus conséquentes) doivent faire attention aux potentielles violations dans cet univers parallèle.
Certaines marques telles que Balenciaga, Disney, Nike se sont lancées dans le Metaverse. La marque espagnole Balenciaga a créé des ‘skins’ pour le jeu vidéo Fortnite. La forme de ces créations est celle d’un NFT.
Verdict: Protégé ou pas?
En bref, on peut protéger sa marque dans le Metaverse. À condition de déposer pour les bonnes classes et d’être vigilant sur les potentielles contrefaçons.
À noter qu’étant donné la nature ‘vacillante’ du metaverse, il faut s’attendre à de nouveaux développements qui pourraient tout chambouler. En attendant, il vaut mieux protéger sa marque dans des classes qui s’appliqueraient à un univers digital. Et se lancer dans le Metaverse pourrait même s’avérer lucratif !
Ecrit par Sweder van Zuylen
Sources:
Diwakar. A. The Metarverse will become embroiled in future geopolitical conflict, Mai 2022. Accessible ici.
Ellbogen E, Charest N, Hitchens S. Virtual reality: navigating trademark challenges in the metaverse. Managing Intellectual Property. Avril 2022:N.PAG. Accessible ici. (EN)
European Innovation Council and SMEs Executive Agency: European Commission Intellectual Property in the Metaverse. Episode II: Trade Marks., ( IP Helpdesk, March 2022, accessible ici. (EN)
Mystakidis, S. Metaverse. Encyclopedia 2022, 2, 486–497. Accessible ici. (EN)
Josh Gerben, Esq, Gerben Law, Intellectual property. Accessible ici. (EN)
Yeeply, “Réalité virtuelle et réalité augmentée : quelles différences ?”. Accessible ici.
[1] McKinsey, Value creation in the Metaverse, Juin 2022. Page 6.
[2] McKinsey, Value creation in the Metaverse, Juin 2022. Page 31.
[3]Diwakar. A. The Metarverse will become embroiled in future geopolitical conflict, Mai 2022